Le financement de la transition écologique : 4 scenarios à horizon 2030

En novembre 2023, l’étude d’I4CE (Institute for Climate Economics) et de la Banque Postale dédiée au financement de l’accélération de l’action climatique des collectivités locales a modélisé une prospective du financement par les collectivités locales de leurs investissements à l’horizon 2030, intégrant un doublement de leurs investissements pour la neutralité carbone. Les quatre scénarios réalisés s’appuient chacun sur un levier de financement prioritaire : 

  • « Dette » : tout le besoin de financement additionnel est financé par de la dette ;
  • « Redirection » : les investissements climat additionnels sont réalisés à la place des investissements habituellement réalisés pour d’autres politiques publiques ;
  • « État » : augmentation du soutien de l’État par une indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation et par la pérennisation du « fonds vert » au-delà de 2024, à 2,5 Md€ par an sur la période, le reste du besoin de financement additionnel étant couvert par de l’endettement ;
  • « Ressources propres » : augmentation des taux de fiscalité locale, augmentation des tarifs, niveau élevé de cessions d’actifs et prélèvement sur le fonds de roulement, le reste du besoin de financement additionnel étant couvert par de l’endettement.

 

Dans trois scénarios sur quatre, le niveau d’investissement hors dette (dépenses d’équipement, subventions versées, et autres) des collectivités locales augmente en euros courants de près de 40 %
entre l’année de référence 2022 et 2030, pour atteindre un point haut historique de plus de 90 Md€ en 2030. Les dépenses d’équipement en particulier atteindraient quasiment 80 Md€. Une telle hausse sur un temps aussi réduit constituerait une inflexion dans l’histoire de la décentralisation, qui a déjà connu des phases d’augmentation des investissements par le passé, mais souvent liées à des transferts de compétences, et accompagnées des ressources associées.

Autre point marquant : le levier qui produirait les effets les plus massifs en termes de soutenabilité des finances locales est celui d’une mobilisation uniforme de nouvelles ressources propres au sein des collectivités, mais c’est également le plus difficile à mettre en œuvre politiquement. Ce levier repose sur une hypothèse d’augmentation uniforme pour toutes les collectivités locales d’une même strate, à la fois des recettes tarifaires (transports en commun, cantines, culture, etc.) et du rendement des principales
taxes sur lesquelles les collectivités ont encore un pouvoir de taux (TFPB, CFE, THRS, TEOM) au début du prochain mandat municipal (2027/28). En matière fiscale, cette augmentation s’ajoute à celle qui est appliquée tous les ans à hauteur des évaluations constatées par le passé, là où tous les autres scénarios prévoient eux une évolution nulle. Néanmoins, ce levier soulève d’épineuses questions politiques. Il est contradictoire avec la volonté des élus communaux et intercommunaux de ne pas pratiquer ces hausses,
dans un contexte où, année après année, la proportion de collectivités à les laisser inchangés reste stable, de l’ordre de 80 % à 85 % (données DGFiP 2023). Il interroge la question de la juste répartition de l’effort de financement de la transition écologique entre contribuables et usagers, ménages et entreprises et ménages entre eux selon leurs situations, que cette étude n’a pas cherché à aborder.

L’étude montre aussi que l’hypothèse d’un soutien accru de l’État limité à l’indexation de la DGF sur l’inflation et au maintien d’un « fonds vert » à 2,5 Md€ chaque année d’ici 2030 ne suffit pas à résoudre
l’équation du financement de la transition.